Ne parle pas aux inconnus. Qui n’a jamais entendu cette recommandation dans la bouche de ses parents de l’enfance à l’adolescence ? Certainement pas Camille, jeune adolescente un peu rebelle, un peu paumée, surprotégée par sa mère. Alors elle ne parle pas aux inconnus mais elle ne parle pas non plus à ses proches. Elle est trop occupée à rêver sa vie plutôt qu’à la vivre.
Et puis un jour, tout bascule. Eva, sa muse, sa meilleure amie, son ambiguë, disparaît, sans laisser de traces, après une soirée de débauche où Camille a fait n’importe quoi par jalousie. Portée par sa culpabilité, Camille va traverser l’Europe de l’Est à sa recherche. Elle va parler à des inconnus, à beaucoup d’inconnus… Et alors ?
Voilà un roman qui met en abyme à la fois nos craintes et nos envies enfouies.
Beaucoup d’entre nous auraient envie de tout plaquer du jour au lendemain pour écouter cette petite voix tapie qui nous incite à prendre la route, avec le minimum vital sur l’épaule. Pour autant, on n’ose pas. Camille le fera pour nous et c’est donc avec plaisir que l’on suivra son périple, semé d’embûches, de rencontres, de découvertes. Dépourvue de nos peurs raisonnées d’adultes avec expérience, elle fera front, elle s’aventurera, elle s’adaptera, toujours courageuse, toujours déterminée.
Le lecteur ne saura jamais vraiment s’il a envie de la féliciter ou bien de la sermonner face à une telle dose d’inconscience. Il pourra aussi trouver les réactions des parents de Camille un peu légères face à la disparition de leur fille aînée mineure durant presque deux mois !
Le roman de Sandra Reinflet fonctionne sur nous. Avec ses chapitres courts, il prend la forme tour à tour d’un journal intime, d’un carnet de route, d’un e-mail, d’un rêve. A l’adolescence, on ne s’embarrasse pas de détails quand on est déterminé, ni de mots trop compliqués, on va à l’essentiel.
Quand arrive la fin – bien trop vite ceci dit, tellement on est emporté – on est pris dans un tourbillon de prise de conscience et on fait le constat, comme bon nombre de voyageurs, que le voyage change une personne en profondeur. Il ouvre le troisième œil, le cœur, l’âme. On revient toujours changé quand on a accepté de donner, mais aussi de recevoir, sur les routes. Camille ne fera pas exception à la règle. Mais en quoi, ça, je vous laisse le découvrir !
Je ne peux pas me plaindre parce qu’on vit dans une maison neuve. Une maison rien qu’à nous, avec un jardin. D’ailleurs on ne dit pas maison mais pavillon. C’est joli comme mot, pavillon. A une lettre près, ça s’envole.
Sauf que d’où je viens, on ne va nulle part.
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