« Motherfucker » scénarisé par Sylvain Ricard, dessiné par Guillaume Martinez et édité par l’excellente maison Futuropolis est un roman graphique qui traite d’un thème que je n’avais jusqu’alors jamais croisé dans ce format. Le lecteur plonge au cœur de l’Amérique raciste des années 70 et, dans le sillage de Vermont Washington, personnage principal de ce récit, pénètre au sein du mouvement des Black Panthers, un parti afro-américain virulent, luttant pour la cause des droits du peuple noir.
Le format de ce récit est ingénieux : chaque clause du « Ten Point Program » des Black Panthers est illustré par des épisodes de la vie de Vermont et de ses amis. Le lecteur peut ainsi considérer l’ampleur du mouvement raciste et il a une vision très large des injustices et sévices subis par le peuple noir. Le lecteur réalise à quel point le racisme est omniprésent, étouffant et touche à tous les aspects de la vie de ses « victimes ». Professionnels, privés, intimes… Ce récit démontre l’importance et la légitimité de l’existence d’un tel parti, mais ne prend pas position. L’auteur parvient à éviter de sombrer dans le manichéisme et ne présente pas les Black Panthers comme le Bien absolu. Nous avons simplement une palette de personnages que l’on accepte avec leurs douleurs, leurs difficultés, leurs espoirs et leurs rêves. Des personnages qui luttent contre l’oppression et les injustices avec les seuls moyens dont ils disposent…
Le graphisme, tout en noir et blanc, offre une grande nuance de gris et épouse ainsi à merveille les propos du récit. A la fois ironique et intelligent, ce choix prouve que noir et blanc peuvent s’unir, passer outre les clivages et donner vie à quelque chose de fort et puissant. Les traits offrent une grande richesse de détails et donnent un souffle énergique à un récit qui défend les plus importants principes de vie.
Instructif, émouvant.
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