Il est parfois de ces œuvres dont on n’a pas forcément l’impression qu’elles ont défrayé la chronique. Du moins on a la sensation d’être passé à côté de quelque chose ; et tout à coup lorsque le regard s’arrête sur le rayonnage ou les aplats de sa librairie favorite, il est évident qu’un élément parmi ses bandes dessinées aurait dû nous attirer bien avant. La trilogie des Chevaucheurs de Maxa’ aux Éditions Clair de Lune entre au grand galop dans cette catégorie.
La sagesse populaire dit que l’on ne juge pas un livre à sa couverture, mais comme toujours ce vieil adage possède ses cas particuliers, puisque pour le quidam qui se laisse séduire par le style graphique, le coffret cartonné de la trilogie Les Chevaucheurs (dont le premier tome est sorti en 2013 et le dernier en 2015) est un véritable « je t’aime » pour les yeux. Dans un petit écrin d’heroïc fantasy épique qui laisse exploser les couleurs et la lumière, une monture aux aspects d’oiseau faite d’acier est éperonnée par une guerrière dont l’armure fait penser que peut-être un amour du manga Saint Seiya aurait pu en partie guider l’illustrateur-auteur dans son œuvre.
On désire en apprendre plus et une fois le coffret acquis, nous plongeons dans le monde fictif des États Alliés de Dombrée, dans un univers fait de magie et de technologie par savantes nuances de steampunk. En effet, le destrier-oiseau du dessin décrit auparavant n’est autre qu’une armonture, cheval de métal animé autant par sortilège que par un savoir-faire que les gens de cette histoire n’ont acquis qu’une vingtaine d’années avant les faits racontés. Ces derniers suivent Darenn, un jeune homme plein d’ambition et féru de mécanique. Loin des nobles lignages, il n’a pourtant qu’un désir : devenir écuyer et prendre soin de l’armonture d’un Chevaucheur, pendant que son maître remporte les plus prestigieux tournois. Son rêve va vite se réaliser et ce petit bonhomme saura utiliser les coups du sort quand il croisera la route de Phénice, l’intrépide guerrière rouge du coffret. Deux problèmes majeurs vont pourtant se poser : d’abord Phénice est douée pour diriger Harpie, sa compagne de métal, mais ignore fichtrement comment elle fait ! Les secrets de la magie employée dans la communion entre un Chevaucheur et son armonture lui apparaissent très flous. En second lieu, elle n’a pas vraiment envie de s’encombrer de Darenn qui ne demande d’ailleurs pas son avis et vient de lui rendre un fier service en réparant la machine délaissée et malmenée par les combats de sa maîtresse.
Bien entendu le destin (et une obstination de Darenn poussant Phénice au désespoir) va les réunir. Ils font route ensemble vers les tournois, mais les complots se trament dans les États de Dombrée et tandis que le secret des armontures pourrait bien être contre toute attente une affaire millénaire, ils vont devoir grandir et poser des choix pour s’investir dans une lutte à dos de bêtes magiques dans laquelle se joue le sort du monde.
Le scénario des Chevaucheurs sonne comme une ritournelle bien connue, mais le talent de Maxa’ ne laisse pas les strophes nous lasser. En tant qu’auteur, il parvient à construire un cycle fermé en seulement trois tomes et prend le temps dans son élan de construire les personnages. Phénice est maladroite, mauvaise magicienne, emportée mais porte en elle une pénible blessure dont les cicatrices ne se dévoileront que progressivement au fil des albums. De son caractère sanguin, elle va tirer le meilleur d’elle-même pour s’attacher à cet écuyer qui n’en finit pas d’être espiègle. Darenn est vif, malin et aussi taquin qu’un petit frère de fortune puisse le devenir. Les deux personnages se traduisent mutuellement leur langage pour continuer à lutter ensemble. En tant qu’illustrateur Maxa’ nous livre à chaque tome des planches lumineuses et colorées qui conviennent tout à fait à cette fantasy. Les cases sont émaillées d’un humour narratif et visuel permanent dans le détail qui va à coup sûr ravir les fans de BD comme de mangas. La trilogie des Chevaucheurs, qui n’est qu’un premier cycle et laisse donc espérer une suite, paraît être un vibrant hommage à plusieurs genres de dessins et d’histoires, tout en restant une création originale et épique, avec un soin de la couleur, de la lumière et du dessin, que les amateurs du genre et les néophytes curieux auront tout lieu d’apprécier.
Wah cette bédé a l’air géniale !! Pour le coup, je suis sérieusement tenté, et je pense que je vais essayer de choper ça dans une librairie ou une bibli ! Ca fait penser un peu au style des Chroniques des contrées oubliées, qui est une des rares bédés fantasy auxquelles j’aie complètement adhéré de bout en bout. En plus le format « série en 3 bédés » est plutôt bon je trouve, ni trop court, ni trop long. Merci Clément pour cette belle découverte :)