Après ce très gros coup de cœur que j’ai eu pour « Le Bleu est une couleur chaude » de Julie Maroh en 2011, j’étais à la fois très tentée et très effrayée par l’adaptation cinématographique « La Vie d’Adèle » de Abdellatif Kechiche. Ce film a tant fait parler de lui, suscité tellement de polémiques que depuis sa sortie je n’osais pas franchir le pas. L’envie était là, mais les craintes aussi. Finalement, l’occasion de le voir s’est présentée naturellement, j’ai fait fi de toutes les horreurs entendues à l’encontre de ce film et je me suis laissée emportée…
« La vie d’Adèle » n’est pas le récit édulcoré d’une invraisemblable histoire d’amour, mais plutôt l’histoire réaliste et brutale d’une relation dont la puissance et la particularité engendrent un grand nombre de difficultés. Aux côtés d’Adèle, nous assistons au premier regard, furtif et évanescent, puis à la rencontre opportune et à la découverte de l’autre. Aux questions typiques et incontournables, parfois empreintes d’une certaine gêne. Enfin, à la naissance de l’amour, qui prend son temps mais qui s’impose comme une évidence, et qui enfle. Jusqu’au point de non-retour. Jusqu’à la perdition.
Comment ne pas aimer Adèle, sa douceur, son innocence, ses expressions attendrissantes, ses mèches rebelles, son sourire spontané et éclatant ? Cette jeune adolescente mène une vie ordinaire, rythmée par les sprints quotidiens pour attraper le bus, le lycée, les copines, les discussions triviales pendant les repas, et les jeux de séduction avec les garçons. Adèle est un peu perdue, elle ignore qui elle est, elle expérimente, elle se cherche. Lorsqu’elle rencontre Emma – un tournant essentiel dans son existence – elle met le doigt sur ses premiers éléments de réponse, surprenants et déroutants… Elle va beaucoup apprendre de cette relation enrichissante avec cette jeune fille aux cheveux bleus, de cinq ans son aînée, sûre d’elle, extravertie, spontanée et très franche, auprès de laquelle elle deviendra une femme. Différentes mais complémentaires, elles apportent couleurs, légèreté, joie, mais aussi intensité, force et douleur dans la vie de l’autre.
Ce film est d’une authenticité incroyable, tant au niveau du jeu de ces deux époustouflantes actrices, de leurs expressions, de leurs attitudes, que des dialogues. Abdellatif Kechiche filme la vraie vie. Telle qu’on la connaît. Quiconque peut se retrouver dans ce film, au détour d’une parole, d’un sentiment ou d’une scène. Nous sommes face à de multiples fragments de notre propre quotidien. Des bribes de conversation ou des gestes simples trouvent un écho en nous, éveillent des souvenirs, des sensations de déjà-vu. Le réalisateur ne souhaite pas nous faire rêver ou nous offrir une porte de sortie vers une possible évasion. Non. Les scènes quotidiennes banales, anodines mais d’une grande justesse se multiplient : les silences à table. Les sanglots, les hoquets, le nez qui coule. Les discussions incompréhensibles où tout le monde parle en même temps, ou au contraire celles ponctuées par de grands blancs. Les bafouilles, les hésitations. Ce film est composé d’une grande richesse de détails réalistes qui font de lui une œuvre puissante, crédible et crue, loin d’être enjolivée.
« La vie d’Adèle » n’est, à mon sens, pas à un film sur l’homosexualité – son acceptation ou son déni – ni sur l’intolérance à laquelle elle doit souvent se confronter. Mais bien un film sur l’amour, sur la vie. J’en retiendrais cette puissante impression de naturel et de spontanéité, qui ne m’a pas quittée pendant tout le film. Ce sentiment de regarder la vie en face. Droit dans les yeux. Sans possibilité de la fuir, de l’esquiver. En visionnant ce film, la vie vous rattrape et vous happe !
En un mot ? Abdellatif Kechiche s’est inspiré d’un chef-d’œuvre pour réaliser un nouveau chef-d’œuvre.
C’est vrai que le film a fait beaucoup parlé de lui… Mais pour le coup, je suis plus tentée de lire la BD que de voir le film :)
En effet j’aurais tendance à te recommander de lire la BD d’abord ! Je l’avais lue il y a quelques années, et après avoir vu le film, je compte la relire :)
la BD a été un très tr_s gros coup de coeur pour moi! je n’ai pas encore vu le film, j’étais pas super emballée, mais plus ça va plus je me dis que je le verrai un de ces quatre!
Et bien, quelle chronique ! J’ai croisé la BD hier, et j’ai failli me la prendre, mais la raison l’a emportée. Par contre, le film, je l’ai ! Jusqu’à présent, je n’osais pas sauter le pas… Mais là, tu m’as convaincue choupette :D
La BD a été un énorme coup de coeur (merciiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii)
Il faut que je vois le film !!!!!!
Je voulais voir ce film depuis longtemps et après avoir lu ta critique, je me lance ce soir, obligé !
Je ne savais pas du tout que c’était inspiré d’une bd par contre, honte à moi.
J’ai vraiment adoré la BD. Je n’étais pas si intéressée par le film même si l’actrice qui joue Emma a l’air.. géniale. Je voyais le personnage, exactement comme ça. Ta chronique me donne envie de donner une chance au film, je le regarderai surement ! :)