J’ai lu « La Fortune de Sila » de Fabrice Humbert dans le cadre du Challenge « Le Prix des Lecteurs du Livre de Poche » et parce que le thème de ce roman m’intéressait. L’histoire met en scène plusieurs personnages dont les les destins se croisent. La première fois, c’est dans un grand et réputé restaurant Parisien, lorsque qu’un Américain brutal et irrespectueux fait une démonstration de force en frappant sans raison valable Sila, un jeune serveur noir. Et personne n’intervient dans la salle. Par lâcheté ou indifférence, personne ne s’élève contre cette injustice ouvertement scandaleuse.
Cette sorte de fait divers est le point de départ autour duquel l’auteur bâtit son roman et convergent les protagonistes. L’auteur s’arrête sur chacun des personnages présents lors de cette scène édifiante de bêtise et de cruauté, sur leur vie professionnelle et affective, et dresse des portraits tous très différents, dont le point commun est l’intense désir de réussir et de s’enrichir en faisant fi de tout sentiment. L’idée m’avait interpelée, malheureusement, je pense être passée totalement à côté de l’intérêt de ce roman. Je me suis ennuyée, ne me suis attachée qu’à un seul personnage, je n’ai pas vibré et ma corde sensible n’a à aucun moment été mise à contribution. Je m’attendais à un livre très sensible et très humain, davantage axé sur des aspects psychologiques, mais j’ai été déçue de constater que les personnages étaient presque tous insensibles, amoraux et peu humains, et que la majeure partie du roman était concentrée sur des thématiques matérielles, économiques et destinée à évoquer la suprématie de l’argent et du pouvoir dans notre monde. Je n’avais pas compris cela à la lecture de la quatrième de couverture et ne m’étais pas renseignée sur ce roman avant de le lire, j’ai donc été désappointée.
L’auteur, très instruit et documenté, nous décrit avec force de détails et de véracité l’ascension sociale de chacun de nos héros, qui les amène à pouvoir manger fièrement dans ce restaurant huppé Parisien. Nous avons un Oligarque Russe et sa femme, un Trader Londonien et son meilleur ami, un Américain, qui après beaucoup de déceptions et de frustrations dans son existence parvient à faire fleurir une entreprise immobilière qui s’enrichit sur le dos des pauvres. Et enfin nous avons Sila, le seul personnage qui m’a émue. Un jeune homme humble, généreux, gentil, chanceux, qui, parti de rien, s’est battu pour se construire et s’en sortir, et s’est fait une belle place dans la société grâce à ses nombreuses qualités. Il m’a touchée car il est le seul personnage dans ce roman à avoir des ambitions plus nobles que la pure course après la gloire et l’argent.
Ce roman contemporain et politique s’ancre dans notre actualité, soulève de véritables questions de société et dénonce la corruption ainsi que le manque d’humanité qui existent dans le monde impitoyable des hautes sphères de la finance. Des thèmes forts et importants, c’est pourquoi je comprends et respecte l’engouement pour ce roman, même si je ne le partage pas.
Morceau choisi
« Ce n’était pas une tache qu’elle fixait, c’était juste sa gargouille à elle, l’homme qu’elle applaudissait autrefois sur le bord du terrain, cet être infantile qu’elle ne pouvait alors s’empêcher d’aimer et même d’admirer, pom-pom girl sautillante, sans comprendre qu’il n’était déjà qu’une gargouille en devenir, un imbécile infatué de lui-même, traversé de frustrations sans espoir, irrémédiablement infantile, soumis au pathétique démon de l’apparence et tournoyant sans fin dans ses illusions défaites de force et de grandeur.
Ainsi, par-delà la ville aux lentes pulsations, une ancienne fan à chaussettes tire-bouchonnées reculait dans la nuit de ses sentiments, au même rythme qu’une femme un peu plus agée et venant de l’autre côté du monde, toutes deux fixant l’ombre d’un dos masculin, abandonné au sommeil de la bêtise et de la cruauté. »
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