La Beauté, universelle, subjective, envoûtante. Mystérieuse. Asservissante. La Beauté, aux visages multiples. Froide, capricieuse et arrogante. Qui aveugle, qui corrompt. Chaleureuse, généreuse et douce. Qui émeut, qui émerveille. Kerascoët et Hubert nous offrent un conte philosophique intelligent, un récit initiatique qui évoque leur vision du concept de la beauté. Dans cette œuvre, il est question de fées, de princesses, de prétendants, de royaumes, de guerres. Tous les ingrédients sont réunis pour composer une fable classique. Classique, il est vrai, mais enrichie d’une dimension philosophique et d’une profondeur fascinantes. Une lecture active, qui invite à la réflexion et au questionnement.
Morue est laide. Exagérément laide. En plus, elle sent le poisson. Son pain quotidien, c’est la raillerie, le mépris. Les humiliations. Le jour où sa route croise celle d’un crapaud, elle est émue aux larmes : enfin un être aussi laid qu’elle. Sa compassion lui vaudra un vœu, car ce crapaud n’est autre… qu’une gentille fée victime d’un mauvais sort. Libérée de ce corps affreux et de cet enchantement terrible, elle offre à Morue ce qu’elle souhaite le plus ardemment : la beauté. Mais il y a une nuance de taille : la petite fée ne peut changer la réalité. Elle peut juste modifier la façon dont les gens perçoivent le réel. Ainsi Morue ne devient pas belle. Elle sera désormais perçue par autrui comme l’incarnation de la beauté. Malgré son visage ingrat.
Hier, elle était Morue, la risée de tous. Aujourd’hui, elle est Beauté, l’objet de convoitise de tous les hommes du royaume – et même au-delà. De modeste bonne à tout faire, elle devient princesse, puis Reine du Royaume, idiote et arrogante. Elle éveille des pulsions incontrôlables chez les hommes, une jalousie dévorante chez les femmes. Ses frasques mettent le royaume à feu et à sang… et son euphorie se muera peu à peu en une profonde mélancolie.
Dans ce conte, la beauté est vue sous une perspective philosophique et sociale. Un message standard est délivré : la beauté ne fait pas le bonheur. On construit sa réussite avec ses actes, son cœur et son âme, pas avec son apparence et ses artifices. Mais l’ambivalence du personnage apporte plus de profondeur à l’analyse. Morue-Beauté est laide et belle à la fois. L’être et le paraître se confondent pour créer un personnage consistant en quête d’identité. La dualité qui l’habite obscurcit sa véritable nature. Qui est-elle vraiment ? La belle jeune femme que tout le monde voit ? La jeune fille laide qu’elle camoufle sous l’enchantement de la fée ? Est-ce le regard d’autrui qui nous forge ?
Dans ce roman graphique magistral, les auteurs nous parlent d’une beauté universelle, irrésistible, capable de rendre fou tous les hommes. Mais la définition de la beauté n’est-elle pas subjective, conditionnée par les époques, les sociétés et leurs cultures ? Il s’agit d’une autre piste de réflexion que lancent Kerascoët et Hubert, sans toutefois la creuser. Libre au lecteur de la développer seul ou non.
Côté graphisme, on ne peut qu’applaudir la prouesse de Kerascoët. La version intégrale de l’œuvre se pare de noir, de blanc et d’ocre, un choix de couleurs qui la gratifie d’une préciosité idéale pour ce récit… Le dessin épuré confirme cette délicatesse. En somme, c’est une très belle œuvre, sur tous les plans.
Les illustrations sont absolument superbes !
Ohhh ça a l’air magnifique!!! J’adore les dessins et le conte a l’air superbe!
Ce titre là me tente depuis un bon moment !
Merci pour cette découverte !
Voilà un album que j’ai très envie de lire ! Et les illustrations sont magnifiques !!
Voilà un livre qui a l’air magnifique tant sur le fond que sur la forme ! :)
J’adore ! Et cette intégrale apporte un vrai plus avec l’épilogue inédit. Du très grand art, tant au niveau du fond que de la forme.
Les dessins sont terribles et encore une fois tu sais nous transporter avec tes mots dans cette aventure livresque ;-)
Il existe une intégrale ? Chic, depuis le temps que je veux la lire !!