Un troisième Kawabata terminé. Ma lecture de « Le Lac » a été plus mitigée que les précédentes. J’ai eu davantage de difficultés à me laisser porter par le récit et entraîner par la plume poétique de Kawabata. Le problème majeur est que je ne me suis pas attachée au personnage principal, et je dirais même qu’il m’a beaucoup insupportée, ce qui a rendu ma lecture quelque peu laborieuse et a faussé mon appréciation générale du roman – que je trouve très bon si je reste objective. En effet il est très fascinant, suscite beaucoup de réflexion et fait naître des interrogations intéressantes.
Ce roman met en scène Gimpei, un homme qui a un penchant un peu particulier pour les femmes. Cela commence avec sa cousine Yagoï, avec laquelle il entretient une relation très ambiguë pendant leur jeunesse. Ça se poursuit plus tard avec une de ses jeunes élèves avec laquelle il a une liaison passionnée. Il aime les belles et toutes jeunes femmes, il est obsédé par elles, jusqu’à les suivre dans la rue, voire jusque chez elles, et il n’hésite pas à les espionner, se créant ainsi beaucoup d’ennuis. Vieillissant et solitaire, mais idéaliste, il est perpétuellement en quête de beauté et de jeunesse.
J’ai trouvé ce héros vraiment agaçant, antipathique, malsain et pervers, je n’ai pas aimé du tout le rapport qu’il entretient avec les femmes, ces inconnues qu’il n’hésite pas à suivre, à épier, à aborder, sans raison apparentes, si ce n’est leur extrême beauté et leur jeunesse. Qu’il les aime, qu’il les admire, qu’il soit fasciné par elle, passe encore, mais que ça en devienne une véritable obsession, qu’il se mette à les suivre n’importe où et à les accoster, j’ai trouvé cela intrusif et dérangeant ! Je me suis identifiée à ces femmes, parfois paniquées par son comportement, et j’ai ressenti ce qu’elles pouvaient éprouver, j’ai eu de la compassion. Alors que pour cet homme, sans doute simplement timide et maladroit avec les femmes, aucune empathie !
Je pense que sur ce roman, les points de vue masculins et féminins doivent être sensiblement différents. Moi j’ai réagi en me mettant à la place de ces femmes, j’ai donc trouvé le héros un peu pathétique et névrosé. Mais je me demande si un homme ne s’identifierait pas, et ne verrait pas en lui un rêveur, un homme timide et gauche. Parce qu’il n’est pas méchant et ne fait rien de réellement choquant non plus, il n’agresse pas ces femmes, il reste plutôt respectueux malgré son comportement louche. Je pense même que ce personnage pourrait apparaître comme touchant, car il est aussi très complexé par ses pieds hideux et simiesques. Cette caractéristique revient de manière récurrente dans le roman, et met en lumière le coté fragile du héros et son incontestable manque de confiance en lui.
En revanche, j’ai trouvé les femmes de ce roman attachantes et admirables, pour certaines d’entre elles. Et le talent de Kawabata a tout de même réussi à me faire apprécier ce roman. C’est sans compter la fin magistrale et ironique qu’il nous a concocté !
Morceau choisi :
« La jeune fille portait un pull-over en laine blanche, et un pantalon ajusté en gros coton d’un gris délavé, dont les revers retroussés montraient la rutilante doublure à carreaux. Entre le pantalon porté court et les chaussures basses, apparaissait la blancheur de la peau. Les cheveux de la jeune fille, noués avec négligence, retombaient en arrière, découvrant la nuque pure, sans défaut. L’une de ses épaules penchait, infléchie en avant par le chien qui tirait sur sa laisse. Gimpei était envoûté par la séduction irréelle de cette jeune fille. La seule couleur de sa peau, aperçue entre les revers à carreaux rouges et les chaussures d’épaisse toile blanche, lui poignait tant le cœur qu’il eût voulu ou mourir, ou supprimer la jeune fille ».
coucou,je suis LILOU vous pouvez me rencontrer sur mon FB
un bon choix Kawabata lisez en plusieurs
Je viens tout juste de le terminer, et je suis mitigée car, comme toi, le héros m’a semblé trop pathétique pour m’y attacher ! Malgré tout je ne regrette pas la lecture de ce deuxième Kawabata, même si « Les belles endormies » fût une bien plus jolie révélation :)
Je n’ai pas lu les Belles Endormies, mais avec ce que tu en dis, j’aimerais le découvrir !