Les bijoux ne sont pas toujours de petite taille.
La preuve ici, lorsque l’on se retrouve face à La mélodie des tuyaux, ce livre de littérature de jeunesse gigantesque !
Vous avez sûrement une petite idée du livre gigantesque ? Agrandissez-la encore un peu.
Voilà, GIGANTESQUE, comme ça.
(Il mesure 40 cm de haut, information ayant son importance si l’on choisit d’en faire l’acquisition personnelle et que l’on était moyennement adepte du jeu Tétris dans le temps jadis !)
La mélodie des tuyaux, album écrit et illustré par Benjamin Lacombe, jeune auteur et illustrateur français, mérite le détour et ce, par l’un des trois chemins principaux qu’il nous fait emprunter et qui en fait toute l’originalité.
On peut choisir tout d’abord d’emprunter le plus discret des petits sentiers en s’intéressant à son histoire. Comme le suggère la couverture, sur laquelle on promène rapidement nos yeux, il va être question d’amour, de la confrontation à la différence. En y regardant de plus près, toujours livre fermé, on voit un petit garçon avec une guitare qui n’est pas sans rappeler le mot « mélodie » du titre. La petite fille, elle, est habillée de couleurs vives, comme une gitane. Et ces « tuyaux », ne serait-ce pas ceux de l’usine que l’on aperçoit dans le fond ?
Tout à fait !
Le lecteur va se glisser discrètement dans une tranche de vie du jeune Alexandre, 13 ans, destiné depuis toujours à rejoindre les tuyaux de l’usine d’à côté, comme le reste de sa famille et de son entourage. Le sablier de l’insouciance ayant fini de faire tomber ses grains de folie, c’est très bientôt qu’Alexandre empruntera les voies métalliques.
Des parents cassés par le travail et par le conformisme d’une vie sans surprise, l’école et ses bonnes notes attendues au tournant, un souvenir aussi gris que ses pensées baignées dans la fumée environnante, tel est le quotidien d’Alexandre. Jusqu’à ce qu’une longue chenille rouge aux anneaux en forme de caravanes vienne apporter cinquante nuances de joie dans cet univers si réduit, même pour un petit garçon.
Ce cirque, aux couleurs de son cœur, lui ouvrira les portes de son avenir, en même temps que les rideaux de l’entrée en piste et en même temps que le déploiement des ailes de l’amour.
Ce court récit conté ne comporte aucun obstacle à la compréhension tant dans la narration que dans le vocabulaire utilisé. Les adultes porteront un regard bienveillant et amusé par le côté naïf alors que les enfants auront le regard sublimé par les paillettes de la magie que véhicule toujours le thème du cirque.
Mais l’entrée par l’histoire est la manière la plus feutrée de passer le seuil de ce conte.
On peut également emprunter la route du Conduit Auditif ! La mélodie des tuyaux a la particularité d’être sonore puisqu’il est accompagné d’un CD sur lequel on trouve l’histoire contée par rien de moins que la voix enfantine d’Olivia Ruiz, mais aussi des musiques de flamenco gitan chantées en espagnol pour plus d’authenticité. Si vous vous sentez pousser les cordes vocales d’un nouveau Kendji, il est possible d’accompagner la troupe des musiciens avec les paroles retranscrites en fin d’album. Attention toutefois, elles ne sont pas traduites et on ne sait malheureusement pas dans quel moment-clé elles accompagnent Alexandre.
On connaissait Olivia Ruiz chanteuse, on découvre ici une nouvelle corde accrochée à son arc artistique, celle de conteuse, bien que cet album soit musical ; ce qui est finalement plaisant puisque d’autres artistes inconnus sont mis en lumière sur la scène musicale sans qu’une artiste dont le talent n’est plus à démontrer ne leur fasse de l’ombre.
Enfin, dernière entrée dans l’album, la principale. Attachez votre ceinture, on pénètre par l’autoroute et ça décoiffe !
Benjamin Lacombe est connu dans le monde de la littérature de jeunesse moins par la qualité de ses écrits que par l’excellence de ses illustrations. La mélodie des tuyaux ne fait pas exception à la règle. La finesse du trait, la performance artistique dans le détail accentuées par le gigantisme du livre, notamment quand les illustrations prennent possession de l’entière double page, nous font plonger tête la première dans la vie d’Alexandre. Mettez des lunettes de protection anti-paillettes poétiques parce que vraiment, le lecteur en prend plein la vue ! C’est simple, il peut se demander en feuilletant l’album s’il ne s’agit pas plutôt d’un livre d’art.
Les dessins accompagnent divinement le texte mais le complètent aussi à la perfection comme par exemple l’illustration de face, où rien ne dépasse et aux couleurs froides de la vie familiale austère d’Alexandre qui contraste avec la représentation d’un plan en contre-plongée aux couleurs chaudes et au joyeux désordre de la vie du cirque. C’est aussi ça le talent d’illustrateur de Benjamin Lacombe ! Cette capacité à alterner à merveille les différents plans de ses scènes de vie : face, plongée, contre-plongée qui dynamisent d’une manière originale son conte.
Est-il bien nécessaire d’évoquer en plus les petites illustrations dorées qui mettent en valeur le texte ? Elles finiront de convaincre les abonnés au site Réfractairesàlalittératuredejeunesse.com !
Comment ? Vous êtes encore là à la fin de cette longue chronique ?
Je vous pensais partis étancher la soif de curiosité pour cette oeuvre !
D’accord.
Voilà le petit bonus pour ceux dont le choix final n’est réservé qu’après une bande-annonce.
Oui, La mélodie des tuyaux possède une bande-annonce ! Incroyable non ?
Magnifique chronique ! on sent que tu as vraiment aimé
Merci ! Ah oui je confirme ! Je dessine des coeurs avec mes doigts ! ;-)
Très très envie de le lire (et de l’écouter) !